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Avant qu’il ne convoite
Blake Pierce


Un mystГЁre Mackenzie White #3
Voici le volume 3 de la série mystère Mackenzie White par Blake Pierce, l’auteur à succès de UNE FOIS PARTIE (bestseller nº1 ayant reçu plus de 600 critiques à cinq étoiles) . Dans AVANT QU’IL NE CONVOITE (Un mystère Mackenzie White – Volume 3), la toute nouvelle agent du FBI Mackenzie White obtient son diplôme à l’académie de Quantico et se retrouve plongée dans une affaire urgente de tueur en série. Des cadavres de femmes apparaissent dans un parc national reculé de Virginie Occidentale alors qu’elles étaient parties faire du camping. Mais le parc est immense et il n’y a aucun lien évident entre les victimes. En même temps, Mackenzie reçoit un appel du Nebraska qui l’incite à vouloir rentrer chez elle. Après de nombreuses années, un nouvel indice est apparu au sujet du meurtre de son père. Vu qu’il ne s’agit plus d’une affaire classée, Mackenzie tente désespérément d’offrir son aide pour la résoudre. Mais le tueur du FBI fait monter la tension d’un cran et aucune distraction n’est possible avec le nombre croissant de disparitions de femmes lors du jeu psychologique du chat et de la souris qui s’ensuit. Ce tueur est plus diabolique – et plus intelligent – que Mackenzie ne l’avait imaginé. En suivant un chemin qu’elle redoute – profondément dans sa propre psyché – elle se retrouve face à un double rebondissement auquel elle ne se serait jamais attendue. Un thriller psychologique sombre avec un suspense qui vous tiendra en haleine, AVANT QU’IL NE CONVOITE est le volume 3 d’une fascinante nouvelle série, et d’un nouveau personnage, qui vous fera tourner les pages jusqu’à des heures tardives de la nuit. Le volume 4 de la série mystère Mackenzie White sera bientôt disponible. Également disponible du même auteur Blake Pierce : UNE FOIS PARTIE (Un mystère Riley Paige – Volume 1) - bestseller nº1 avec plus de 600 critiques à cinq étoiles - et téléchargement gratuit !







AVANT QU’IL NE CONVOITE



(UN MYSTÈRE MACKENZIE WHITE—VOLUME 3)



B L A K E P I E R C E


Blake Pierce



Blake Pierce est l’auteur de la série à succès mystère RILEY PAIGE, qui comprend six volumes (pour l’instant). Black Pierce est également l’auteur de la série mystère MACKENZIE WHITE, comprenant trois volumes (pour l’instant) ; de la série mystère AVERY BLACK, comprenant trois volumes (pour l’instant) ; et de la nouvelle série mystère KERI LOCKE.

Lecteur avide et admirateur de longue date des genres mystère et thriller, Blake aimerait connaître votre avis. N’hésitez pas à consulter son site www.blakepierceauthor.com (http://www.blakepierceauthor.com) afin d’en apprendre davantage et rester en contact.



Copyright В© 2016 par Blake Pierce. Tous droits rГ©servГ©s. Sous rГ©serve de la loi amГ©ricaine sur les droits d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut ГЄtre reproduite, distribuГ©e ou transmise sous quelque forme ou par quelque procГ©dГ© que ce soit, ni enregistrГ©e dans une base de donnГ©es ou un systГЁme de rГ©cupГ©ration, sans l'accord prГ©alable de l'auteur. Ce livre Г©lectronique est sous licence pour usage personnel uniquement. Ce livre Г©lectronique ne peut ГЄtre ni revendu, ni donnГ© Г  d'autres personnes. Si vous dГ©sirez partager ce livre avec quelqu'un, veuillez acheter une copie supplГ©mentaire pour chaque bГ©nГ©ficiaire. Si vous lisez ce livre et que vous ne l'avez pas achetГ©, ou qu'il n'a pas Г©tГ© achetГ© pour votre usage personnel uniquement, veuillez le rendre et acheter votre propre copie. Merci de respecter le travail de cet auteur. Il s'agit d'une Е“uvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les endroits, les Г©vГ©nements et les incidents sont soit le produit de l'imagination de l'auteur, soit utilisГ©s de maniГЁre fictive. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existГ© est purement fortuite. Image de couverture Copyright andrey_l, utilisГ© sous licence de Shutterstock.com.


LIVRES PAR BLAKE PIERCE



SÉRIE MYSTÈRE RILEY PAIGE

UNE FOIS PARTIE (Volume 1)

UNE FOIS PRISE (Volume 2)

UNE FOIS DÉSIRÉE (Volume 3)

UNE FOIS ATTIRÉE (Volume 4)

UNE FOIS TRAQUÉE (Volume 5)

UNE FOIS ÉPINGLÉE (Volume 6)



SÉRIE MYSTÈRE MACKENZIE WHITE

AVANT QU’IL NE TUE (Volume 1)

AVANT QU’IL NE VOIE (Volume 2)

AVANT QU’IL NE CONVOITE (Volume 3)



SÉRIE MYSTÈRE AVERY BLACK

MOTIF POUR TUER (Volume 1)

MOTIF POUR S’ENFUIR (Volume 2)

MOTIF POUR SE CACHER (Volume 3)



SÉRIE MYSTÈRE KERI LOCKE

UNE EMPREINTE DE MORT (Volume 1)


TABLE DES MATIГ€RES



PROLOGUE (#u2562369c-636a-4c97-8ab3-c31d63137cb6)

CHAPITRE UN (#ued344147-6939-5a6d-98cc-68d2417f0747)

CHAPITRE DEUX (#ufbcdc66d-12df-56be-ade1-d4c87b8f866f)

CHAPITRE TROIS (#u1101fb0d-e916-589a-8abb-36810961321c)

CHAPITRE QUATRE (#u1f3cc423-8cc6-5d69-8704-e90f383206f0)

CHAPITRE CINQ (#u68dcd571-ef90-5216-8fb3-8db54e31961c)

CHAPITRE SIX (#ubac068e0-c68f-5661-85d2-f54c000bc131)

CHAPITRE SEPT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE ONZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DOUZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TREIZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE QUATORZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE QUINZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE SEIZE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-SEPT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE DIX-NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT ET UN (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-DEUX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-TROIS (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-QUATRE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-CINQ (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-SIX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-SEPT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-HUIT (#litres_trial_promo)

CHAPITRE VINGT-NEUF (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE ET UN (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-DEUX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-TROIS (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-QUATRE (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-CINQ (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-SIX (#litres_trial_promo)

CHAPITRE TRENTE-SEPT (#litres_trial_promo)








PROLOGUE


Pam s’assit sur le tronc d’arbre couché en bordure du camping et alluma une cigarette. Elle se sentait pleine d’énergie après l’amour. Derrière elle, la tente de Hunter était dressée en forme de dôme écorné. Elle l’entendait ronfler à l’intérieur. Même ici, dans les bois, c’était pareil ; elle, elle était là, éveillée et pleine d’énergie après leurs ébats sexuels, et lui dormait à poings fermés. Mais ici, dans les bois, ça n’avait pas autant d’importance.

Elle creusa un petit trou dans le sol pour y déposer ses cendres, bien consciente qu’il était vraiment imprudent de sa part de fumer en forêt durant un automne qui avait été jusqu’ici assez sec. Elle leva les yeux au ciel et fixa les étoiles du regard. C’était une nuit très fraîche. L’automne avait fini par s’installer sur la côte Est et les températures avaient chuté de manière significative. Elle appréciait cet instant et aurait aimé que la tente de Hunter soit équipée de l’une de ces bâches à mailles qui permettait de voir au travers mais ce n’était malheureusement pas le cas. Cette escapade avait néanmoins été romantique – loin de chez eux et seuls en forêt. C’était ainsi qu’elle envisageait une vie en commun, jusqu’à ce que cet idiot finisse par lui demander sa main. Avec ce beau ciel nocturne, ce climat parfait et leur incroyable alchimie, c’était l’une des plus belles nuits de sa vie.

Elle avait envie de retourner à l’intérieur de la tente et de se réchauffer contre lui mais elle devait d’abord aller aux toilettes. Elle pénétra dans la forêt et prit un instant pour prendre ses repères. Il lui était maintenant difficile de voir dans quelle direction se diriger. Il faisait sombre; les étoiles et la demi-lune projetaient un peu de lumière mais pas assez. Elle observa ce qui l’entourait, presque certaine qu’elle n’avait qu’à tourner à gauche pour trouver les toilettes.

Elle avança sans faire de bruit dans cette direction pendant une trentaine de secondes. Quand elle se retourna, elle ne parvint plus à distinguer la tente.

В« Merde, В» murmura-t-elle, en paniquant un peu.

Ressaisis-toi, se dit-elle, tout en continuant Г  avancer. La tente est juste lГ  et...

Son pied gauche heurta quelque chose et avant qu’elle n’ait eu le temps de réaliser ce qui lui arrivait, elle trébucha. Elle parvint à tendre les bras au dernier moment, afin d’empêcher que son visage ne heurte le sol. Elle eut le souffle coupé et se remit directement sur pied, d’un air gêné.

Elle se retourna pour regarder le tronc sur lequel elle venait de trébucher, d’un air contrarié. Dans l’obscurité, la forme avait l’air étrange, presqu’abstraite. Mais il y avait une chose dont elle était certaine : c’était qu’il ne s’agissait pas d’un tronc d’arbre.

Elle voulut croire que c’était l’obscurité qui lui jouait des tours. Ça devait être le résultat de jeux d’ombres dans le noir.

Mais avec des sueurs froides lui traversant le dos, elle dut se rendre à l’évidence : c’était bien ce qu’elle croyait être.

Une jambe humaine.

Et d’après ce qu’elle pouvait en discerner, c’était tout ce qu’il y avait. Il n’y avait aucun corps qui l’accompagnait. Elle gisait là, sur le sol, partiellement dissimulée par le feuillage et des branches d’arbres. Le pied était recouvert d’une chaussure de sport et d’une chaussette trempée de sang.

Pam laissa Г©chapper un cri. Elle se retourna et se mit Г  courir dans la nuit noire, sans cesser de hurler un seul instant.




CHAPITRE UN


Mackenzie était assise dans le siège passager d’une sedan appartenant au FBI et tenait en main un Glock de service – une arme qui était devenue une sorte de seconde peau pour elle. Mais aujourd’hui, le Glock lui donnait une sensation différente. En fait, après aujourd’hui, tout serait différent.

La voix de Bryers la fit sortir de son état de rêvasserie. Il était assis derrière le volant et la regardait avec l’air d’un père déçu par sa fille.

« Tu sais… tu n’es pas obligée de le faire, » dit Bryers. « Personne ne te regardera de travers si tu n’y vas pas. »

В« En fait, je me sens obligГ©e de le faire. Je me le dois Г  moi-mГЄme. В»

Bryers soupira et regarda à travers le pare-brise. Devant eux, un grand parking était éclairé par de faibles réverbères placés sur les bords et au centre de l’espace. Trois voitures y étaient garées et Mackenzie pouvait distinguer la silhouette de trois hommes qui faisaient les cent pas d’un air anxieux.

Mackenzie tendit la main et ouvrit la portiГЁre de la voiture.

В« Tout va bien se passer, В» dit-elle.

« Je sais, » dit Bryers. « Mais… fais quand même attention à toi. Si quelque chose t’arrive ce soir et que certaines personnes apprennent que j’étais ici avec toi… »

Elle n’attendit pas la fin de sa phrase. Elle sortit de la voiture et ferma la portière derrière elle. Elle tenait le Glock avec le canon baissé et s’avança lentement en direction des trois hommes qui se tenaient près des voitures. Elle savait qu’il n’y avait aucune raison d’être nerveuse mais elle ne parvenait pas à s’en empêcher. Même en voyant le visage d’Harry Dougan parmi eux, elle restait sur les nerfs.

« Il fallait vraiment que ce soit Bryers qui t’amène ? » demanda l’un des hommes.

« Il garde un œil sur moi, » dit-elle. « Il n’apprécie guère aucun d’entre vous. »

Les trois hommes se mirent à rire, puis regardèrent en direction de la voiture que Mackenzie venait de quitter. Ils firent tous un signe à Bryers d’une manière parfaitement synchronisée. Bryers leur décocha un faux sourire et leur montra le majeur de sa main droite en guise de réponse.

« Même moi, il ne m’aime toujours pas, hein ? » demanda Harry.

В« Non, dГ©solГ©e. В»

Les deux autres hommes regardérent Harry et Mackenzie du même air résigné qu’ils avaient eu l’habitude d’adopter ces dernières semaines. Bien qu’ils ne soient pas vraiment en couple, ils étaient maitenant assez proches que pour créer de légères tensions parmi leurs condisciples. Le plus petit des hommes s’appelait Shawn Roberts et l’autre, un homme robuste de deux mètres de haut, était Trent Cousins.

Cousins dГ©signa de la tГЄte le Glock que Mackenzie tenait en main et dГ©gaina le sien.

В« Alors, on y va ? В»

« On y va ! Nous n’avons probablement pas beaucoup de temps devant nous, » dit Harry.

Ils regardèrent autour d’eux avec un air de conspiration. Un sentiment d’exaltation commença à remplir l’air et Mackenzie se rendit soudain compte que ça l’amusait beaucoup. C’était la première fois depuis son enfance qu’elle était vraiment enthousiaste au sujet de quelque chose.

В« ГЂ trois, В» dit Shawn Roberts.

Ils frétillaient et ne tenaient plus en place au moment où Harry commença le compte à rebours.

« Un… deux… trois ! »

En une fraction de seconde, ils avaient tous les quatre disparu. Mackenzie fonça vers la gauche, en direction de l’une des trois voitures. Derrière elle, elle entendit le bruit assourdi de coups de feu tirés par les autres. Les armes qu’ils utilisaient étaient bien entendu fictives… des armes de paintball créées et conçues afin de donner l’impression d’être de vraies armes. Ce n’était pas la première fois que Mackenzie se retrouvait dans un environnement de munitions à blanc mais c’était la première fois qu’elle le faisait sans la présence d’un instructeur – et sans aucune protection.

Une traînée de peinture rouge explosa au sol, à seulement quinze centimètres de son pied droit. Elle se baissa davantage pour mieux se cacher derrière la voiture et se faufila rapidement vers l’avant du véhicule. Elle se mit à quatre pattes et vit deux paires de pieds plus loin devant elle. L’une de ces paires se dirigeait derrière une autre voiture pour s’y cacher.

Mackenzie avait analysé la disposition du terrain au moment où ils s’étaient tous retrouvés et elle savait que le meilleur endroit où se tenir était la base du pilier en pierre qui soutenait le réverbère au centre du parking. Comme le reste de la ruelle Hogan, la disposition de ce parking était aussi aléatoire que possible mais avait toujours pour but la formation de stagiaires de l’académie. C’est pourquoi Mackenzie savait qu’il y avait toujours un endroit idéal dans chaque site, qui permettait de réussir sa mission avec succès. Dans le cas de ce parking, il s’agissait de la colonne du réverbère. Elle n’était pas parvenue à s’y rendre tout de suite car deux des autres types se tenaient déjà devant au moment où Harry avait compté jusqu’à trois. Mais maintenant, il fallait qu’elle se débrouille pour y arriver sans se faire descendre.

Elle serait éliminée si elle était touchée. Et il y avait cinq cents dollars en jeu. Elle se demanda depuis combien de temps ce petit rituel de pré-graduation avait été mis en place par les stagiaires et comment c’était devenu une sorte de légende cachée parmi les premiers de chaque classe.

Alors qu’elle était absorbée par ces pensées, elle remarqua qu’Harry et Cousins avait entamé un échange de tirs de l’autre côté du parking. Cousins se tenait derrière l’une des voitures et Harry était collé sur le côté d’une benne à ordures.

Avec un sourire aux lèvres, Mackenzie visa en direction de Cousins. Il était bien caché et elle ne pourrait pas l’atteindre de là où elle se trouvait mais elle pouvait l’effrayer un peu. Elle visa le coin supérieur de la voiture et tira. Une traînée de peinture bleue explosa au moment où le coup atteignit le véhicule. Elle vit Cousins reculer brusquement, son attention détournée d’Harry. Ce dernier tira avantage de la situation et tira à deux reprises.

Elle espérait qu’il comptait ses balles. Le but de leur petit exercice nocturne non autorisé était de s’en sortir sans être touché. Chaque joueur avait la même arme à sa disposition – un pistolet qui tirait des billes de peinture – et ils avaient reçu le nombre de cartouches correspondant au type de Glock que leur arme était destinée à copier. Ils avaient donc reçu quinze cartouches chacun. Il en restait maintenant quatorze à Mackenzie et elle était presque sûre que les trois autres hommes avaient tiré au moins trois ou quatre balles chacun.

Maintenant qu’Harry et Cousins étaient occupés, il ne restait que Shawn. Mais elle n’avait aucune idée de l’endroit où il se trouvait. Malgré sa stature, il était doué pour se déplacer de manière furtive.

Elle se mit prudemment à genoux et leva la tête sur le côté de la voiture, cherchant Shawn des yeux. Elle ne le vit pas mais elle entendit le petit bruit étouffé d’une arme qui tirait à proximité. Elle se jeta rapidement en arrière au moment où une bille de peinture heurta le bord du parechoc de la voiture. Un peu de peinture verte éclaboussa sa main lorsqu’elle recula mais ça ne comptait pas.

Pour être éliminé, il fallait être touché au bras, à la jambe, dans le dos ou au torse. Les tirs à la tête n’étaient pas permis. Bien que les billes soient petites et fabriquée en plastique fin, elles pouvaient provoquer des commotions cérébrales. Et en recevoir une dans l’œil pouvait vous rendre aveugle à vie. C’était l’une des raisons pour laquelle ce petit exercice n’était pas vu d’un bon oeil au sein du Bureau. Ils savaient néanmoins qu’il avait lieu tous les ans et ils regardaient généralement ailleurs pour laisser aux stagiaires leur petit moment d’amusement.

Par contre, ce tir permit à Mackenzie de deviner où se cachait Shawn. Il s’était retranché derrière le pilier en béton et, comme elle l’avait envisagé pour elle-même, il avait maintenant tout le monde dans sa ligne de mire. Il détourna son attention de Mackenzie et tira en direction d’Harry. Il le rata de peu, atteignant le haut de la benne à ordures, à seulement quelques centimètres de la tête d’Harry qui se jeta au sol au moment où Cousins et Shawn se mirent à tirer sur lui.

Mackenzie tira en direction de Shawn et le coup faillit l’atteindre à l’épaule. Mais il se baissa promptement au moment où elle tira, évitant ainsi d’être touché. Pendant ce temps, elle entendit Cousins hurler de frustration et de douleur.

« C’est fini pour moi, » dit Cousins, en se dirigeant lentement vers le bord du parking. Il s’assit sur un banc, là où ceux qui étaient éliminés devaient attendre en silence. Mackenzie vit une tache de peinture jaune au niveau de sa cheville, à l’endroit où Harry l’avait touché.

Harry profita de cette distraction pour sortir prГ©cipitament de sa cachette derriГЁre la benne Г  ordures. Il se rua rapidement en direction de la troisiГЁme voiture garГ©e.

Au moment où il se mit à courir, Shawn sortit de sa cachette. Il tira d’abord en direction de Mackenzie pour qu’elle reste planquée, puis porta son attention vers Harry. Il tira dans sa direction et le coup atteignit le sol à seulement cinq centimètres du pied gauche d’Harry au moment où il bondissait derrière la voiture.

Mackenzie en profita pour se diriger vers l’arrière de la voiture, pensant pouvoir faire sortir Shawn de son retranchement. Elle tira sur le côté gauche du pilier en béton, au même endroit où elle avait tiré lorsqu’elle était planquée derrière l’avant de la voiture. Au moment où la bille de peinture explosa, Shawn attendit un moment avant de sortir de sa cachette et se retrouva face à l’avant de la voiture. Au moment où elle le vit, Mackenzie bondit de l’arrière de la voiture et avança rapidement et calmement. Lorsque son angle de tir le lui permit, elle tira et le coup atteignit Shawn directement à la hanche. De la peinture verte explosa sur son pantalon et son t-shirt. Il était tellement abasourdi par l’attaque qu’il en tomba assis sur ses fesses.

« C’est fini pour moi aussi, » hurla Shawn, en regardant Mackenzie d’un air renfrogné.

Au moment où il se dirigeait vers le bord du parking pour y rejoindre Cousins, Mackenzie perçut un mouvement furtif sur sa gauche.

Petit salopard, pensa-t-elle.

Elle se jeta au sol et se retrancha derrière le pilier en béton. La lumière du réverbère brillait de manière vive au-dessus d’elle, tel un spot. Mais elle savait que ça pouvait jouer en sa faveur lorsque son attaquant se trouverait dans l’ombre. La lumière pouvait être trop vive, déstabilisant légèrement son tir.

Au moment où elle se colla contre le béton, elle entendit une bille de peinture atteindre l’arrière du pilier. Dans le silence qui s’ensuivit, elle entendit Cousins et Shawn ricaner sur le banc.

В« Г‡a va ГЄtre amusant Г  regarder, В» dit Cousins.

В« Amusant ? В» dit Shawn. В« Je dirais plutГґt douloureux. В»

À travers leurs rires, Mackenzie ne put pas s’empêcher de sourire à la situation. Elle savait qu’Harry lui tirerait dessus. Ils n’avaient pas le genre de relation où il lui lècherait les bottes et aurait envie de la flatter au point de la laisser gagner. Ils étaient tous les deux dans le même bateau – ils allaient tous deux être diplômés demain et nommés agents.

Ils avaient par contre passé beaucoup de temps ensemble, tant dans le contexte de l’académie que dans d’autres situations plus amicales. Mackenzie le connaissait bien et elle savait ce qu’elle devait faire pour l’avoir. Se sentant presque mal à l’aise pour ce qu’elle allait faire, Mackenzie se pencha lentement vers l’extérieur et tira. Le coup atteignit la roue de la voiture derrière laquelle il se cachait.

Il sortit tout de suite de son retranchement et sa tête surgit au-dessus du capot. Elle fit semblant de se diriger vers la droite, comme si elle retournait se cacher derrière le pilier. Et comme prévu, c’est là où il tira. Mais Mackenzie changea de direction et roula sur la gauche. Elle se redressa sur son ventre, leva son arme et tira.

Le coup atteignit Harry sur le côté droit du torse. Dans l’obscurité où il se tenait, la couleur jaune de la peinture était presqu’aussi vive que la couleur du soleil.

Harry baissa les épaules et jeta son arme dans le parking. Il sortit de sa cachette derrière la voiture et secoua la tête, d’un air surpris.

« C’est fini pour moi. »

Mackenzie se mit sur pieds et pencha la tête en fronçant les sourcils.

В« Tu es fГўchГ© ? В» demanda-t-elle, en le taquinant.

« Pas du tout. C’était bien joué. »

Derrière eux, Cousins et Shawn applaudissaient. Encore plus loin derrière, Bryers sortait de sa voiture et se dirigeait vers eux. Mackenzie savait qu’il avait été inquiet pour elle mais qu’il avait également été honoré de l’avoir accompagnée. En effet, la tradition voulait qu’un agent expérimenté soit présent lors de ce petit exercice, au cas où quelque chose irait mal. Ça arrivait de temps en temps. Mackenzie avait entendu parler de ce type qui avait été touché à l’arrière du genou en 1999 et qui avait dû recevoir son diplôme en béquilles.

Bryers les rejoignit au moment où ils se retrouvèrent tous près du banc. Il glissa la main dans sa poche et en sortit les cinq cents dollars qu’il avait gardés pour eux – c’était l’argent qu’ils avaient tous versés dans le pot commun. Il les tendit à Mackenzie et dit :

« On savait tous qui allait gagner, n’est-ce pas ? »

« Bon boulot, Mac, » dit Cousins. « Je préfère que ce soit toi qui m’aies éliminé plutôt que l’un de ces bouffons. »

В« Merci pour le compliment, В» dit Mackenzie.

« Je déteste l’idée de passer pour un vieux con, » dit Bryers, « mais il est presqu’une heure du matin. Rentrez chez vous et reposez-vous. Ne venez pas à la remise des diplômes sans avoir dormi et sans vous être reposés. »

Un sentiment étrange de joie envahit à nouveau Mackenzie. C’était son groupe d’amis – un groupe d’amis qu’elle avait appris à bien connaître depuis qu’elle était retournée à un semblant de vie normale après la petite expérience que McGrath avait faite avec elle neuf semaines plus tôt.

Demain, ils allaient tous être diplômés de l’académie et, si tout se déroulait comme prévu, ils seraient tous nommés agents la semaine prochaine. Pendant qu’Harry, Cousins et Shawn ne s’attendaient pas forcément à débuter leurs carrières sur des affaires prestigieuses, Mackenzie quant à elle, était bien plus impatiente de passer à l’étape suivante… c’est-à-dire, le groupe spécial d’agents dont McGrath lui avait parlé quelques jours après sa dernière affaire. Elle ne savait toujours pas ce que ça impliquait mais elle était impatiente d’en savoir plus.

Au moment où leur petit groupe se dispersa et que chacun partit de son côté, Mackenzie ressentit autre chose qu’elle n’avait plus ressenti depuis longtemps. Elle eut le sentiment que le futur se trouvait devant elle, qu’il était sur le point de se dévoiler et qu’il était à portée de main. Et pour la première fois depuis bien longtemps, elle sentit que c’était elle qui choisissait la direction à lui donner.



*



Mackenzie regarda l’hématome sur le torse d’Harry et bien qu’elle sache qu’elle aurait dû ressentir de la compassion pour lui, elle ne pouvait pas s’empêcher de rire. L’endroit où elle l’avait touché était enflammé et la rougeur se répandait sur un diamètre de cinq centimètres tout autour. Ça ressemblait beaucoup à une piqûre d’abeille mais, elle le savait, ça faisait beaucoup plus mal.

Ils étaient debout dans sa cuisine et elle était occupée à envelopper un glaçon dans une lavette pour le lui donner. Elle le lui tendit et il l’appliqua sur l’endroit enflammé, d’un air un peu gauche. Il était clair qu’il était mal à l’aise mais il était également touché par le fait qu’elle l’ait invité chez elle pour s’assurer qu’il allait bien.

« Je suis désolée, » dit-elle, d’un ton sincère. « Mais tu sais, je peux peut-être t’inviter à un café avec ce que j’ai gagné. »

« Ça devra être un sacrément bon café, » dit Harry. Il éloigna le glaçon de son torse et plissa le nez en regardant vers l’endroit de l’inflammation.

Pendant que Mackenzie le regardait, elle se rendit compte que, bien qu’il soit venu à son appartement plus d’une dizaine de fois et qu’ils se soient embrassés à quelques reprises, c’était la première fois qu’il était torse nu chez elle. C’était aussi la première fois depuis Zack qu’elle voyait d’aussi près un homme partiellement dénudé. C’était peut-être l’adrénaline d’avoir gagné la compétition ou peut-être l’approche de la remise des diplômes demain, mais elle aimait ça.

Elle s’avança et plaça une main sur le côté indemne de son torse, au niveau de son cœur. « Est-ce que tu as encore mal ? » demanda-t-elle, en se rapprochant encore davantage de lui.

« Pas à l’instant présent, » dit-il, en souriant nerveusement.

Elle fit lentement glisser sa main vers la zone enflammée et la toucha délicatement. Puis, sous l’effet d’instincts féminins qu’elle avait enterrés depuis longtemps et remplacés par un sentiment d’obligation et d’ennui, elle se pencha et embrassa l’endroit où elle l’avait touché. Elle sentit qu’il se contracta aussitôt. Sa main glissa le long de ses hanches et elle l’attira plus près d’elle. Elle embrassa sa clavicule, la naissance de son épaule et son cou. Il soupira et l’attira plus près de lui.

Comme c’était généralement le cas avec eux, ils s’embrassaient avant même de se rendre compte de ce qui se passait. C’était arrivé à quatre reprises auparavant et à chaque fois, c’était comme si c’était naturel, quelque chose d’imprévu et sans aucune attente d’aucune sorte.

En moins de dix secondes, elle se retrouva légèrement plaquée contre le plan de travail de la cuisine. Ses mains à elle parcouraient sa poitrine pendant que sa main à lui remontait le long de son t-shirt. Son cœur battait à tout rompre et chaque partie de son corps lui disait qu’elle le désirait, qu’elle était prête.

Ils avaient déjà failli passer le cap auparavant – à deux reprises, en fait. Mais à chaque fois, ils s’étaient interrompus. En fait, c’était elle qui avait arrêté. La première fois, elle l’avait interrompu au moment où il cherchait à ouvrir le bouton de son pantalon. La deuxième fois, il était assez saoûl et elle était bien trop sobre. Ils ne se l’étaient jamais dit aussi clairement, mais leur hésitation à coucher ensemble venait surtout du respect mutuel qu’ils avaient l’un pour l’autre et d’une incertitude quant au futur. Elle avait une bien trop haute opinion d’Harry pour l’utiliser simplement pour satisfaire un besoin sexuel. Elle se sentait de plus en plus attirée par lui mais le sexe avait toujours été pour elle un sujet très privé. Avant Zack, il n’y avait eu que deux hommes et l’un d’entre eux avait été plutôt un cas d’agression qu’un cas de sexe consenti mutuellement.

Alors que toutes ces pensées lui traversaient l’esprit au moment où elle embrassait Harry, elle réalisa que ses mains étaient maintenant posées bien plus bas que son torse. Il l’avait apparemment également remarqué, car il se contracta et prit une profonde inspiration.

Elle retira précipitamment ses mains et s’éloigna de lui. Elle fixait le sol du regard car elle avait peur de voir de la déception dans ses yeux.

« Attends, » dit-elle. « Harry… Je suis désolée… Je ne peux pas… »

« Je sais, » dit-il, sur un ton légèrement frustré. « Je sais que c’est… »

Mackenzie prit une profonde inspiration et s’éloigna de lui. Elle détourna son regard, incapable de supporter la confusion et la douleur qu’elle pouvait lire dans ses yeux. « On ne peut pas. Je ne peux pas. Je suis désolée. »

« Ce n’est pas grave, » dit-il, sur un ton toujours clairement perturbé. « Demain est un grand jour et il est tard. Alors je vais m’en aller avant que le fait d’être abattu une seconde fois prenne trop d’importance. »

Elle se retourna pour lui faire face et hocha la tГЄte. Son commentaire acГ©rГ© ne la dГ©rangeait pas, car elle le mГ©ritait en quelque sorte.

« C’est sûrement ce qu’il y a de mieux à faire, » dit-elle.

Harry enfila son t-shirt taché de peinture et se dirigea lentement vers la porte. « Tu as fait du bon boulot ce soir, » dit-il au moment de partir. « J’étais sûr que tu allais gagner. »

« Merci, » dit Mackenzie, sans aucune expression. « Et Harry… vraiment, je suis désolée. Je ne sais pas ce qui m’arrête. »

Il haussa les épaules au moment d’ouvrir la porte. « Ce n’est pas grave, » dit-il. « C’est juste… je ne pourrai pas faire ça encore pendant longtemps. »

В« Je sais, В» dit-elle, sur un ton triste.

В« Bonne nuit, Mac В»

Il ferma la porte derrière lui et Mackenzie se retrouva seule. Elle se tenait debout dans sa cuisine et regardait l’heure. Il était une heure et quart et elle n’était pas du tout fatiguée. Peut-être que le petit exercice dans la ruelle Hogan avait pompé trop d’adrénaline dans ses veines.

Elle essaya néanmoins d’aller dormir mais elle passa la plupart de la nuit à se retourner dans son lit. Dans un état de demi-sommeil, elle eut toute une série de rêves dont elle ne se rappela pas vraiment mais l’une des constantes dans chacun d’entre eux était le visage de son père, souriant, fier qu’elle soit arrivée aussi loin – que demain, elle soit diplômée de l’académie.

Mais malgré ce sourire, il y avait une autre constante dans tous ces rêves, quelque chose à laquelle elle s’était habituée depuis longtemps, une image qui la tourmentait souvent lorsque les lumières s’éteignaient et qu’il était l’heure de dormir : le regard fixe de son père mort et le sang qui l’entourait.




CHAPITRE DEUX


Bien que Mackenzie ait programmé son réveil pour qu’il sonne à huit heures, elle fut réveillée en sursaut par la vibration de son téléphone à six heures quarante-cinq. Elle se réveilla en grommelant. Si c’est Harry qui appelle pour s’excuser de quelque chose dont il n’est même pas responsable, je vais l’étrangler, pensa-t-elle. Encore à moitié endormie, elle attrapa son téléphone et y jeta un coup d’œil, la vue brouillée.

Elle fut soulagée de voir que ce n’était pas Harry, mais Colby.

Perplexe, elle décrocha. Colby n’était pas du genre à se lever tôt et elles ne s’étaient pas parlé depuis plus d’une semaine. Maniaque au possible, Colby était probablement stressée à mort concernant la remise des diplômes et les incertitudes quant à leur futur. Colby était la seule amie femme que Mackenzie s’était faite ici à Quantico. C’est pourquoi elle faisait tout son possible pour entretenir cette amitié, même si ça signifiait répondre à un appel tôt le matin du jour même de la remise de leurs diplômes, après n’avoir dormi que quatre heures et demie d’un sommeil très agité.

В« Salut, Colby, В» dit-elle. В« Tout va bien ? В»

В« Tu dormais ? В» demanda Colby.

В« Oui. В»

« Oh, je suis vraiment désolée. Je pensais que tu serais debout dès les premières lueurs de l’aube, avec l’excitation de tout ce qui nous attend. »

« C’est juste une remise de diplômes, » dit Mackenzie.

« J’aimerais bien que ce ne soit que ça, » dit Colby, d’une voix légèrement hystérique.

« Tout va bien ? » demanda Mackenzie, en s’asseyant lentement sur son lit.

« Ça finira par aller, » dit Colby. « Dis… tu penses que tu pourrais me retrouver au Starbucks de la cinquième rue ? »

В« Quand ? В»

В« DГЁs que possible. Je pars maintenant de chez moi. В»

Mackenzie n’avait pas envie d’y aller – en fait elle n’avait même pas envie de sortir de son lit. Mais elle n’avait jamais entendu Colby dans un tel état. Et vu l’importance de cette journée, elle se dit qu’elle devrait faire de son mieux pour être présente pour son amie.

В« Je serai lГ  dans une vingtaine de minutes, В» dit Mackenzie.

En soupirant, Mackenzie sortit de son lit et fit le strict minimum pour se prГ©parer Г  sortir de chez elle. Elle se brossa les dents, enfila un sweat et un pantalon de training, attacha ses cheveux en queue de cheval et sortit.

En parcourant les six pâtés de maisons qui la séparaient de la cinquième rue, elle commença à sentir le poids de cette journée s’abattre sur ses épaules. Elle terminait aujourd’hui sa formation à l’académie du FBI, allait recevoir son diplôme un peu avant midi et se trouvait parmi les cinq premiers de sa classe. À la différence de la plupart des stagiaires qu’elle avait appris à connaître durant les vingt dernières semaines, aucun membre de sa famille ne viendrait assister à la remise de son diplôme et célébrer avec elle sa réussite. Elle serait toute seule, comme elle l’avait été durant la majeure partie de sa vie, depuis l’âge de seize ans. Elle faisait des efforts pour se persuader que ça n’avait pas vraiment d’importance mais en fait, ça l’affectait. Ça ne la rendait pas triste mais provoquait plutôt en elle une sorte de sentiment d’angoisse auquel elle s’était habituée au fil du temps.

Alors qu’elle s’approchait du Starbucks, elle remarqua même que le traffic était un peu plus dense que normal – probablement dû à l’arrivée des amis et de la famille des autres stagiaires. Mais cette idée ne l’affecta pas vraiment. Elle avait passé les dix dernières années de sa vie à s’efforcer de ne pas se préoccuper de ce que sa mère et sa soeur pensaient d’elle, alors pourquoi commencer aujourd’hui ?

Quand elle entra dans le Starbucks, elle vit que Colby était déjà arrivée. Elle sirotait une tasse de café et regardait d’un air absent à travers la vitre. Une autre tasse était posée devant elle. Mackenzie supposa que c’était pour elle. Elle prit place en face de Colby tout en lui montrant bien qu’elle était complètement crevée : ses yeux se rétrécirent avec un air maussade au moment où elle s’assit.

« C’est pour moi ? » demanda Mackenzie, en prenant la tasse de café en main.

« Oui, » dit Colby. Elle avait l’air fatiguée, triste et d’humeur assez maussade.

« Alors, que se passe-t-il ? » demanda Mackenzie, afin d’éviter que Colby ne cherche à tourner autour du pot.

В« Je ne vais pas au FBI, В» dit Colby.

В« Quoi ? В» demanda Mackenzie, sur un ton rГ©ellement surpris. В« Je pensais que tu avais tout rГ©ussi haut la main. В»

« Oui, c’est vrai. Mais c’est juste que… je ne sais pas. Être à l’académie m’a épuisée. »

« Colby… tu n’es pas sérieuse, là. »

Elle avait dit ça sur un ton insistant mais elle s’en fichait. Ça ne ressemblait pas du tout à Colby. Une telle décision était le résultat d’une remise en question totale. Ça n’avait rien à voir avec un caprice ou le stress d’une femme au bord de la crise de nerfs.

Comment pouvait-elle abandonner ?

« Mais je suis sérieuse, » dit Colby. « Ça ne m’intéresse plus vraiment depuis au moins trois semaines. Parfois, je rentre chez moi et je pleure sur mon sort car je me sens piégée. Je n’ai plus du tout envie de ça. »

Mackenzie Г©tait stupГ©faite. Elle ne savait pas vraiment quoi dire.

В« Et tu prends cette dГ©cision le jour de la remise des diplГґmes ? В»

Colby haussa les épaules et se mit à nouveau à regarder d’un air absent à travers la vitre. Elle avait l’air crevée et démoralisée.

« Colby… tu ne peux pas laisser tomber. Ne fais pas ça. » Ce qu’elle avait sur le bout de la langue mais qu’elle évita de dire, c’était : Si tu arrêtes maintenant, ces vingt dernières semaines ne signifient plus rien. Et ça fait aussi de toi une dégonflée.

« Ah, mais je n’abandonne pas vraiment du tout au tout, » dit Colby. « J’irai à la remise des diplômes aujourd’hui. En fait, il faut que j’y aille, je n’ai pas le choix. Mes parents sont venus de Floride pour l’occasion et je n’ai pas vraiment d’autre alternative que d’y aller. Mais après ça, ce sera fini. »

Quand Mackenzie avait commencé son entraînement à l’académie, les instructeurs les avaient prévenus que le taux d’abandon parmi les stagiaires durant les vingt semaines de formation était d’environ vingt pourcents – et qu’il était même arrivé jusqu’à trente pourcents dans le passé. Mais penser que Colby ferait partie de ces chiffres n’avait aucun sens.

Colby avait une forte personnalité et faisait preuve d’obstination. Comment pouvait-elle prendre une telle décision avec autant de désinvolture ?

« Qu’est-ce que tu vas faire, alors ? » demanda Mackenzie. « Si tu laisses vraiment tout ça derrière toi, tu penses te diriger vers quoi ? »

« Je ne sais pas, » dit-elle. « Peut-être quelque chose en rapport avec la prévention du trafic d’êtres humains. Quelque chose dans le domaine de la recherche ou des ressources, je ne sais pas. Je veux dire par là qu’être agent du FBI n’est pas ma seule option, n’est-ce pas ? Il y a des tonnes d’autres options. Mais je ne veux pas être un agent. »

В« Tu parles vraiment sГ©rieusement en fait, В» dit Mackenzie, sur un ton sec.

« Oui. Je voulais juste t’en informer maintenant parce qu’après la remise des diplômes, mes parents vont vouloir toute mon attention. »

Oh, ma pauvre petite, pensa Mackenzie, sur un ton sarcastique. Г‡a doit vraiment ГЄtre horrible.

В« Je ne comprends toujours pas pourquoi, В» dit Mackenzie.

« Et je ne m’attends pas à ce que tu le comprennes. C’est vraiment ton truc, tu es douée et tu adores ce que tu fais. Je pense que tu as été faite pour être agent, tu sais ? Quant à moi… je ne sais pas. Un effondrement soudain et inattendu, j’imagine. »

« Oh, Colby… je suis désolée. »

« Pas besoin de l’être, » dit-elle. « Une fois que j’aurai remis papa et maman dans l’avion pour la Floride, je me sentirai soulagée. Je leur dirai que je ne me sentais pas de taille à faire face à une affaire qui m’aurait été assignée d’emblée. Et après ça, j’imagine que je ferai autre chose qui me plaira davantage. »

« Et bien… bonne chance, j’imagine, » dit Mackenzie.

« Mais pas question que ça t’affecte, » dit Colby. « Aujourd’hui, tu finis dans les cinq premiers de la classe et il est hors de question que mes drames personnels ne t’affectent. Tu as été une très bonne amie, Mac. Je voulais que ce soit moi qui te l’apprenne maintenant plutôt que de remarquer mon absence dans quelques semaines. »

Mackenzie ne fit aucun effort pour dissimuler sa déception. Elle n’aimait pas l’idée de recourir à des tactiques infantiles mais elle resta silencieuse durant un instant, à siroter son café.

В« Et toi ? В» demanda Colby. В« Tu as des amis ou de la famille qui viennent ? В»

В« Non, personne, В» dit Mackenzie.

« Oh, » dit Colby, sur un ton mal à l’aise. « Je suis désolée. Je ne savais pas… »

« Pas besoin de t’excuser, » dit Mackenzie. C’était maintenant à elle de regarder d’un air absent à travers la vitre, en disant : « Je préfère encore que ce soit comme ça. »



***



Mackenzie ne fut pas du tout impressionnée par la cérémonie de remise des diplômes. Ce ne fut rien de plus qu’une version formalisée de sa remise de diplôme du lycée, sans être aussi élégante et formelle que sa remise de diplôme à l’université. En attendant que son nom soit appelé, elle eut le temps de repenser à ces remises de diplôme et au fait que sa famille avait disparu progressivement du paysage avec chacune d’entre elles.

Elle se rappela qu’elle était au bord des larmes au moment où elle était montée sur l’estrade pour recevoir son diplôme du lycée. Elle était triste de savoir que son père ne la verrait jamais grandir. C’était quelque chose qu’elle avait toujours su durant toute son adolescence mais qui l’avait frappée de plein fouet le jour où elle avait reçu son diplôme. Ça l’avait moins affectée à l’université. Au moment de monter sur l’estrade pour recevoir son diplôme d’université, sa famille n’était pas présente dans la foule. Elle réalisa durant cette cérémonie que c’était là un moment clé dans sa vie, où elle décida une fois pour toutes qu’elle préférait affronter sa vie toute seule. Si sa famille ne s’intéressait pas à elle, alors elle ne s’intéresserait pas à sa famille.

La cérémonie se clôtura sans fanfare. Une fois qu’elle fut terminée, Mackenzie vit Colby prendre des photos en compagnie de son père et de sa mère de l’autre côté du grand vestibule où les diplômés et leurs invités s’étaient dirigés après la cérémonie. D’après ce que Mackenzie pouvait en voir, Colby faisait du bon boulot pour avoir l’air heureuse devant ses parents. Et durant tout ce temps, ses parents rayonnaient de fierté.

Se sentant un peu mal à l’aise et sans but précis, Mackenzie se demanda si elle parviendrait rapidement à s’en aller, quitter la foule, rentrer chez elle, enlever sa robe de cérémonie et ouvrir la première des nombreuses bières qu’elle envisageait de boire cet après-midi. Au moment où elle se dirigeait vers la porte, elle entendit une voix familière derrière elle, qui l’appelait par son prénom.

« Hé, Mackenzie, » dit la voix de l’homme. Elle sut tout de suite de qui il s’agissait – non seulement par la voix elle-même mais aussi car il y avait très peu de personnes ici qui l’appelaient Mackenzie au lieu de White.

C’était Ellington. Il portait un costume et avait l’air aussi mal à l’aise que Mackenzie. Cependant, le sourire qu’il lui décocha fut un peu trop à l’aise. Mais à cet instant précis, ça ne la dérangea pas vraiment.

В« Salut, agent Ellington. В»

« Je pense que dans une telle situation, tu peux m’appeler Jared. »

В« Je prГ©fГЁre Ellington, В» dit-elle, avec un lГ©ger sourire.

В« Comment te sens-tu ? В» demanda-t-il.

Elle haussa les épaules et réalisa combien elle avait envie de partir d’ici. Elle pouvait se mentir à elle-même autant qu’elle le voulait mais le fait qu’aucun membre de sa famille, ami ou amant ne soit présent commençait à lui peser.

« Seulement un haussement d’épaule ? » demanda Ellington.

В« Je ne sais pas, comment devrais-je me sentir ? В»

« Fière, enthousiaste, accomplie… pour ne citer que quelques adjectifs. »

« Je ressens tout ça, » dit-elle. « C’est juste que… je ne sais pas. Tout l’aspect de la cérémonie, c’est un peu de trop. »

« Je comprends bien, » dit Ellington. « J’ai vraiment horreur de porter un costume. »

Mackenzie était sur le point de faire un commentaire sur le fait que le costume lui allait assez bien quand elle vit McGrath s’approcher derrière Ellington. Il lui sourit aussi mais à la différence du sourire d’Ellington, le sien avait l’air un peu forcé. Il lui tendit la main et elle la prit, un peu surprise que sa poigne soit aussi molle.

В« Je suis content que vous ayez rГ©ussi, В» dit McGrath. В« Je sais que vous avez une belle carriГЁre prometteuse devant vous. В»

« Sans vouloir mettre la pression, n’est-ce pas ? » dit Ellington.

В« Dans les cinq premiers de votre classe, В» dit McGrath, ne laissant pas le temps Г  Mackenzie de placer un mot. В« Du trГЁs bon boulot, White. В»

« Merci, monsieur, » fut tout ce qu’elle parvint à trouver à dire.

McGrath se pencha pour se rapprocher d’elle, sur un mode maintenant très professionnel. « J’aimerais que vous veniez à mon bureau lundi matin à huit heures. J’aimerais que vous preniez rapidement connaissance du fonctionnement interne. Votre contrat est déjà prêt. Je l’avais préparé il y a longtemps pour qu’il soit prêt quand ce jour arriverait. C’est pour dire la confiance que j’ai en vous. Alors… n’attendons pas. Lundi à huit heures. C’est bon pour vous ? »

В« Bien sГ»r, В» dit-elle, surprise par cet Г©lan inattendu de soutien.

Il sourit, lui serra Г  nouveau la main et disparut rapidement dans la foule.

Une fois que McGrath fut parti, Ellington la regarda d’un air perplexe, avec un large sourire.

« Et bien, il est de bonne humeur. Et je peux te dire que ça n’arrive pas très souvent. »

« J’imagine que c’est un grand jour pour lui, » dit Mackenzie. « Une toute nouvelle recrue de talents où il peut venir choisir ce qui lui convient. »

« C’est vrai, » dit Ellington. « Mais blague à part, il est très clairvoyant dans sa manière d’utiliser de nouveaux agents. Garde ça en tête quand tu le verras lundi matin. »

Un silence dérangeant s’installa entre eux. C’était un silence qu’ils rencontraient souvent et qui était devenu une sorte de composante de leur amitié – ou, en tout cas, de ce qu’il y avait entre eux.

« Dis, écoute, » dit Ellington. « Je voulais juste te féliciter. Et je voulais que tu saches que tu pouvais toujours m’appeler si tu en ressens le besoin. Je sais que ça peut avoir l’air stupide mais à un moment – même pour la célèbre Mackenzie White – il se peut que tu aies besoin de quelqu’un pour vider ton sac. Ça peut être rapidement prenant ce job. »

В« Merci, В» dit-elle.

Elle eut soudain envie de lui demander de venir avec elle – pas dans une optique romantique mais juste pour être accompagnée de quelqu’un qui lui était familier. Elle le connaissait assez bien et bien qu’elle ait des sentiments contradictoires à son sujet, elle avait envie qu’il soit à ses côtés. Elle n’aimait pas l’admettre mais elle commençait à penser qu’elle devait faire quelque chose pour célébrer ce jour et cet instant dans sa vie. Et même s’il s’agissait de passer quelques heures gênantes avec Ellington, ce serait toujours mieux (et probablement plus productif) que de boire toute seule à s’apitoyer sur son sort.

Mais elle ne dit rien. Et même si elle était parvenue à rassembler son courage, ça n’aurait pas eu beaucoup d’importance. Ellington hocha rapidement de la tête en signe d’au revoir et, tout comme McGrath, disparut dans la foule.

Mackenzie resta immobile durant un instant, s’efforçant de faire disparaître le sentiment grandissant d’être absolument seule.




CHAPITRE TROIS


Lorsque Mackenzie arriva le lundi pour son premier jour de travail, elle ne parvenait pas à oublier ce que lui avait dit Ellington, aux mots qui tournaient dans sa tête tel un mantra : il est très clairvoyant dans sa manière d’utiliser de nouveaux agents. Garde ça en tête quand tu le verras lundi matin.

Elle pensait à ces mots afin de se calmer car pour dire vrai, elle était vraiment très nerveuse. Et ça n’alla pas en s’améliorant quand l’un des hommes de McGrath, Walter Hasbrook, maintenant son responsable de département, la prit en charge dès le matin et l’accompagna jusqu’aux ascenseurs comme si elle était une enfant. Walter avait l’air d’avoir la soixantaine et avait une quinzaine de kilos en trop. Il n’avait aucune personnalité et bien que Mackenzie n’ait rien contre lui, elle n’aimait pas la manière dont il lui expliquait chaque chose comme si elle était à moitié stupide.

Et il continua ainsi tout en l’accompagnant jusqu’au troisième étage, où un dédale de box s’étalait tel un zoo. Des agents se tenaient à chaque box, certains parlaient au téléphone pendant que d’autres tapaient à leur ordinateur.

« Et voici le tien, » dit Hasbrook, en désignant d’un geste un box au centre d’une des rangées latérales. « C’est la centrale pour la recherche et la surveillance. Il y a quelques emails qui t’attendent, pour te donner accès aux serveurs et à la liste de contacts du Bureau. »

Elle pénétra dans son box et se sentit un peu désenchantée mais toujours nerveuse. Non, ça n’avait rien à voir avec l’affaire passionnante sur laquelle elle avait espéré travailler pour débuter sa carrière mais c’était quand même la première étape vers tout ce qu’elle avait cherché à obtenir depuis qu’elle était sortie du lycée. Elle tira sur son fauteuil à roulettes et s’assit.

L’ordinateur portable qui se trouvait devant elle était maintenant à elle. C’était l’un des points sur lesquels Hasbrook avait insisté. Le bureau était à elle, le box, tout l’espace. Ce n’était pas vraiment glamour mais c’était son espace.

« Dans tes emails, tu trouveras des informations concernant ta première affectation, » dit Hasbrook. « Si j’étais toi, je m’y mettrais tout de suite. Ce serait bien que tu appelles l’agent en charge de l’affaire afin de vous organiser, mais il faudrait que tu sois bien au courant de toute l’affaire à la fin de la journée. »

« OK, » dit-elle, en allumant l’ordinateur. Une partie d’elle était encore fâchée d’avoir été reléguée à un travail de bureau. Elle voulait être active sur le terrain. Après tout ce que McGrath lui avait dit, c’était ce à quoi elle s’attendait.

Peu importe que tu aies déjà de l’expérience, se dit-elle, tu ne peux pas t’attendre à débuter sur une grosse affaire. C’est peut-être une façon de payer ton dû – ou peut-être que McGrath cherche à te montrer qui est le chef et te remettre à ta place.

Avant que Mackenzie n’ait eu le temps de répondre à ses instructions énoncées sur un ton morne et monotone, Hasbrook avait déjà disparu. Il se dirigeait rapidement en direction des ascenseurs, comme s’il était heureux d’en avoir fini avec sa tâche du jour.

Quand il fut parti et qu’elle se retrouva seule dans son box, elle se connecta à son ordinateur en se demandant pourquoi elle était toujours aussi nerveuse.

C’est sûrement parce que c’est le grand jour, pensa-t-elle. J’ai travaillé dur pour arriver jusqu’ici et j’y suis finalement parvenue. Tous les yeux sont maintenant rivés sur moi, alors je ne peux pas rater mon coup – même s’il s’agit d’un bête travail de bureau.

Elle consulta ses emails et envoya les réponses nécessaires afin de pouvoir commencer à travailler sur son affectation. En une heure, elle avait tous les documents et toutes les ressources dont elle avait besoin. Elle était déterminée à faire de son mieux, afin de montrer à McGrath qu’il gâchait son talent en la reléguant à un travail de bureau.

Elle examina de près des cartes, des enregistrements téléphoniques et des données GPS, afin de déterminer la position de deux suspects potentiels, impliqués dans un réseau de trafic sexuel. Après une heure de profonde concentration, elle se sentit entièrement impliquée dans l’affaire. Le fait qu’elle ne soit pas actuellement sur le terrain, à rechercher activement ce genre de types, ne la dérangeait pas pour l’instant. Elle était concentrée et elle avait un objectif en vue. C’était tout ce dont elle avait besoin.

Oui, bien sûr, c’était une tâche subalterne et limite ennuyeuse, mais elle refusait de laisser ça entraver son travail. Elle fit une pause pour déjeuner et se remit sur l’affaire, travaillant avec ferveur et obtenant des résultats. Quand la journée se termina, elle envoya ses observations par email à son responsable de département et s’en alla. Elle n’avait jamais eu un travail de bureau auparavant mais ça ressemblait fortement à ce qu’elle s’en imaginait. Il ne manquait que le compteur pour pointer sa carte.

Au moment où elle atteignit sa voiture, elle se laissa envahir à nouveau par un sentiment de déception. Un travail de bureau. Coincée derrière un ordinateur et entre les murs d’un box. Ce n’était pas du tout ce qu’elle avait imaginé.

Malgré ça, elle était fière d’être arrivée là où elle était. Elle ne laisserait pas son ego ni ses attentes lui faire oublier qu’elle était aujourd’hui un agent du FBI. Mais elle ne put tout de même pas s’empêcher de penser à Colby. Elle se demanda où elle se trouvait à l’instant présent et ce qu’elle aurait à dire si elle apprenait qu’on lui avait assigné un travail de bureau pour débuter sa carrière.

Et une petite partie de Mackenzie ne put s’empêcher de se demander si Colby n’avait pas été la plus clairvoyante en prenant la décision de partir.

Est-ce qu’elle allait travailler à ce bureau durant des années ?



***



Mackenzie arriva le lendemain matin, bien décidée à passer une bonne journée. Hier, elle avait fait de grandes avancées sur son affaire et elle avait le sentiment que si elle parvenait à fournir rapidement des résultats efficaces, McGrath s’en rendrait compte.

Tout de suite, elle se rendit compte qu’on lui avait attribué une autre affaire. Celle-ci concernait une fraude à la carte verte. Les documents annexés aux emails lui fournissaient plus de trois cents pages de témoignages, de dossiers et documents gouvernementaux et le jargon juridique en tant que ressource. Ça avait l’air d’une tâche incroyablement fastidieuse et ennuyeuse.

Enragée, Mackenzie jeta un coup d’œil en direction du téléphone. Elle avait accès aux serveurs et donc au numéro de téléphone de McGrath. Elle se demanda ce qu’il répondrait si elle l’appelait pour lui demander pourquoi elle était punie d’une telle façon.

Mais elle se ravisa et au lieu de cГ©der Г  la tentation, elle imprima chaque document et les empila sur son bureau.

Ça faisait une vingtaine de minutes qu’elle était occupée à cette tâche abrutissante lorsqu’elle entendit que quelqu’un frappait légèrement à l’entrée de son box. Elle se retourna et lorsqu’elle vit qu’il s’agissait de McGrath, elle resta immobile durant un instant.

McGrath lui souriait de la même manière qu’il l’avait fait lorsqu’il était venu lui parler lors de la remise de son diplôme. Il y avait quelque chose dans ce sourire qui lui faisait penser qu’il n’avait vraiment aucune idée qu’elle puisse se sentir rabaissée par le fait d’être coincée dans un box.

« Désolé que ça m’ait pris autant de temps avant de venir vous voir, » dit McGrath. « Mais je voulais vous saluer et voir comment ça allait. »

Elle ravala la première réponse qui lui vint en tête. Elle haussa les épaules d’une manière peu enthousiaste et dit : « Ça va. C’est juste que… et bien, je suis un peu surprise et déconcertée. »

В« Ah bon ? En quoi ? В»

« Et bien, à plusieurs reprises, vous m’avez dit être impatient de m’avoir en tant qu’agent actif. J’imagine que je ne pensais pas que ça impliquerait de me retrouver assise derrière un bureau à imprimer des documents concernant la carte verte. »

В« Oui, je sais, je sais. Mais faites-moi confiance. Il y a une raison valable Г  tout Г§a. Continuez Г  faire votre boulot. Votre heure arrivera, White. В»

Elle entendit à nouveau la voix d’Ellington résonner à ses oreilles. Il est très clairvoyant dans sa manière d’utiliser de nouveaux agents.

Si vous le dites, pensa-t-elle.

« On se reparle très bientôt, » dit McGrath. « D’ici là, prenez soin de vous. »

Et comme Hasbrook le jour précédent, McGrath eut l’air pressé de s’éloigner des box. Elle le regarda partir, se demandant quel type de leçon ou d’aptitude particulière elle était sensée apprendre. Elle détestait l’idée de se sentir supérieure à la tâche qui lui était assignée mais bon, il y avait des limites…

Ce qu’Ellington avait dit concernant McGrath… était-elle vraiment sensée le croire ? En pensant à Ellington, elle se demanda s’il avait une idée du genre de tâche à laquelle on l’avait reléguée. Puis elle pensa à Harry et se sentit coupable de ne pas l’avoir appelé ces derniers jours. Harry était resté silencieux dans son coin car il savait qu’elle avait horreur de se sentir sous pression. C’était une des raisons pour laquelle elle continuait à le voir. Aucun homme n’avait vraiment jamais été aussi patient avec elle. Même Zack avait ses limites et la seule raison pour laquelle ils étaient restés aussi longtemps ensemble, c’était parce que leur relation était devenue confortable et qu’ils n’avaient aucune envie d’être confrontés au changement.

Il était presque midi quand Mackenzie fit une dernière pile de paperasseries sur son bureau. Avant de se plonger dans la tonne de formulaires et de paperasses qui l’attendaient, elle se dit qu’elle ferait mieux d’aller grignoter quelque chose et de prendre un grand café.

Elle traversa le corridor en direction des ascenseurs. Lorsque l’ascenseur arriva et que les portes s’ouvrirent, elle fut surprise d’y voir Bryers de l’autre côté. Il avait également l’air étonné de la voir mais il lui décocha un large sourire.

« Hé, qu’est-ce que tu viens faire ici ? » demanda-t-elle.

« En fait, je venais te voir. J’ai pensé que tu aurais peut-être envie d’aller déjeuner. »

« C’est exactement ce que j’allais faire. Très bonne idée. »

Ils descendirent en ascenseur et s’assirent à une table dans une petite épicerie à proximité. Lorsqu’ils furent assis devant leurs sandwiches, Bryers alla directement au but en lui posant une question lourde de sens.

В« Comment Г§a se passe ? В» demanda-t-il.

« Et bien… ça se passe. Coincée derrière un bureau, piégée dans un box, à lire des tonnes de paperasseries, ce n’est pas exactement ce que j’avais imaginé. »

« Venant de n’importe quel autre nouvel agent, ça aurait l’air d’un commentaire d’enfant gâté, » dit Bryers. « Mais en l’occurrence, je suis d’accord avec toi. Tes capacités ne sont pas utilisées à bon escient. C’est pour ça que je suis là. Je suis venu à ta rescousse. »

Elle leva les yeux vers lui, d’un air interrogateur.

В« Quel genre de rescousse ? В»

« Une autre affaire, » répondit Bryers. « Enfin, maintenant, si tu as envie de rester à travailler sur ce qui t’occupe actuellement et continuer à éplucher des cas de fraude à l’immigration, je comprends. Mais je pense que j’ai quelque chose à te proposer qui t’intéressera davantage. »

Elle sentit son cЕ“ur battre Г  tout rompre.

« Tu as l’autorité nécessaire pour me changer d’affaire ? » demanda-t-elle, sur un ton suspicieux.

« Oui, de fait. À la différence de la dernière fois, aujourd’hui tu as le soutien de tout le monde. J’ai reçu l’appel de McGrath il y a une demi-heure. Il n’est pas vraiment fan à l’idée de t’envoyer au cœur de l’action, mais j’ai réussi à lui forcer un peu la main. »

« Vraiment ? » demanda-t-elle, se sentant soulagée et, comme Bryers l’avait mentionné, légèrement gâtée.

« Je peux te montrer l’historique de mes appels, si tu veux. Il allait t’appeler et te le dire lui-même mais je lui ai demandé de pouvoir te l’annoncer. Je pense qu’il savait depuis hier que tu allais finir par travailler là-dessus mais nous voulions nous assurer d’avoir une affaire solide. »

« Et c’est le cas ? » demanda-t-elle. Elle sentit une boule d’excitation se former dans son estomac.

« Oui, c’est le cas. Nous avons trouvé un cadavre dans un parc à Strasburg, en Virginie. Ça ressemble très fort à un autre corps que nous avons trouvé dans la même zone il y a environ deux ans. »

В« Et tu penses que les deux affaires sont liГ©es ? В»

Il écarta la question d’un geste de la main et prit une bouchée de son sandwich.

« Je t’en parlerai lorsqu’on sera en route. Pour l’instant, mangeons. Profite du silence tant que tu le peux. »

Elle hocha la tête et se mit à grignoter son sandwich bien qu’elle n’ait soudain plus vraiment faim du tout.

Elle ressentait une forme d’excitation, mais également d’effroi et de tristesse. Quelqu’un avait été assassiné.

Et Г§a allait ГЄtre Г  elle de rectifier les choses.




CHAPITRE QUATRE


Ils partirent de Quantico directement après le déjeuner. Alors que Bryers conduisait en direction du Sud-ouest, Mackenzie avait l’impression d’être sauvée de l’ennui total, uniquement pour être emportée vers un danger certain.

« Alors que peux-tu me dire au sujet de l’affaire ? » finit-elle par demander.

« Un cadavre a été découvert à Strasburg, en Virginie. Le corps a été retrouvé dans un parc naturel, dans un état très semblable à celui d’un autre corps qui avait été découvert dans la même zone il y a environ deux ans. »

В« Tu penses que les deux affaires sont liГ©es ? В»

« À mon avis, oui. Même emplacement et même type de meurtre brutal. Les dossiers sont dans mon sac sur le siège arrière, si tu veux y jeter un coup d’œil. »

Elle tendit le bras vers le siГЁge arriГЁre et attrapa le porte-documents que Bryers emportait en gГ©nГ©ral avec lui lorsque des recherches allaient ГЄtre nГ©cessaires. Elle en sortit un dossier, tout en continuant Г  lui poser des questions.

В« Quand est-ce que ce deuxiГЁme corps a-t-il Г©tГ© dГ©couvert ? В» demanda-t-elle.

« Dimanche. Et pour l’instant il n’y a aucune trace nous permettant de nous diriger dans une direction ou l’autre. Il n’y a pas de piste, cette fois-ci. Nous avons besoin de toi. »

В« Pourquoi moi ? В» demanda-t-elle, sur un ton curieux.

Il la regarda, d’un air curieux également.

« Tu es un agent maintenant – et sacrément douée pour ce genre d’affaire, » dit-il. « Les gens parlent déjà à ton sujet, des personnes qui ne savaient pas vraiment qui tu étais lorsque tu es arrivée à Quantico. Bien qu’il ne soit pas normal qu’un nouvel agent se retrouve sur une affaire telle que celle-ci, et bien, tu n’es pas non plus vraiment un agent ordinaire, n’est-ce pas ? »

В« Est-ce une bonne ou une mauvaise chose ? В» demanda Mackenzie.

« Ça va dépendre de tes performances, j’imagine, » dit-il.

Elle décida d’en rester là et concentra son attention sur le dossier. Bryers lui jetait des coups d’œil furtifs pendant qu’elle en survolait le contenu – soit pour évaluer sa réaction ou peut-être pour voir où elle en était. Pendant qu’elle prenait connaissance du dossier, Bryers se mit à parler de l’affaire.

« Ça ne prit que quelques heures avant d’être presque certains que ce meurtre était lié à un autre corps qui avait été découvert il y a presque deux ans, à environ cinquante-cinq kilomètres de là. Les photos qui se trouvent dans le dossier concernent ce premier cadavre. »

« Il y a deux ans, » dit Mackenzie, sur un ton méfiant. Sur la photo, elle vit un corps salement mutilé. C’était tellement insupportable à voir qu’elle dut regarder ailleurs durant un instant. « Comment peux-tu relier aussi facilement les deux meurtres entre eux avec un tel laps de temps entre les deux ? »

« Parce que les deux corps ont été retrouvés dans le même parc naturel et qu’ils ont été charcutés de la même manière. Et tu sais ce qu’on pense des coïncidences au Bureau, n’est-ce pas ? »

« Qu’elles n’existent pas ? »

В« Exactement. В»

« Strasburg, » dit Mackenzie. « Je ne connais pas du tout. C’est une petite ville, c’est ça ? »

« Plutôt de taille moyenne. Population d’environ six mille habitants. Une de ces villes typiques du Sud qui se raccroche encore à la Guerre de Sécession. »

В« Et il y a un parc naturel lГ -bas ? В»

« Et bien oui, » dit Bryers. « Je ne le savais pas non plus. Et un parc d’assez grande taille, en plus. Le parc naturel Little Hill. Environ cent quinze kilomètres de terre, en tout. Il s’étend presque jusqu’au Kentucky. Beaucoup de gens y vont pour y pêcher, y faire du camping ou de la randonnée. Beaucoup d’espace inexploré de forêt. Ce genre de parc naturel. »

В« Comment les corps ont-ils Г©tГ© dГ©couverts ? В» demanda Mackenzie.

« Un campeur a trouvé le deuxième corps samedi soir, » dit Bryers. « Quant au cadavre qui a été découvert il y a deux ans, c’était une scène assez horrible. Le corps a été retrouvé des semaines après le meurtre. Il était en décomposition et des animaux sauvages s’en étaient nourri, comme tu peux le voir sur les photos. »

В« Des indications prГ©cises sur la maniГЁre dont ils ont Г©tГ© tuГ©s ? В»

« Aucune que nous soyons à même d’identifier. Les corps étaient salement mutilés. Le premier cadavre d’il y a deux ans – la tête avait pratiquement été tranchée, les dix doigts avaient été coupés et n’ont jamais été retrouvés et la jambe droite avait disparu. Quant au cadavre plus récent, les morceaux étaient en quelque sorte éparpillés un peu partout. La jambe gauche a été trouvée à deux cents mètres du reste du corps. La main droite a été coupée et n’a pas encore été retrouvée. »

Mackenzie soupira, submergГ©e durant un instant par tout le mal qui sГ©vissait dans le monde.

В« Quelle brutalitГ©, В» dit-elle doucement.

Il hocha de la tГЄte.

В« Oui, de fait. В»

В« Tu as raison, В» dit-elle. В« Il y a trop de similaritГ©s pour les ignorer. В»

Il s’interrompit et laissa échapper une toux qu’il couvrit avec l’intérieur de son coude. C’était une toux profonde, longue et sèche, du style de celles qui venaient juste après un gros rhume.

В« Г‡a va ? В» demanda-t-elle.

« Oui, ça va. C’est le début de l’automne et mes stupides allergies resurgissent toujours à cette période de l’année. Mais… et toi ? Est-ce que ça va ? La remise des diplômes est terminée, tu es maintenant officiellement un agent du FBI et le monde est à toi. C’est une idée stimulante ou plutôt terrifiante pour toi ? »

В« Un peu des deux, В» dit-elle honnГЄtement.

В« Des membres de ta famille sont venus te voir pour ta remise de diplГґme de samedi ? В»

« Non, » dit-elle. Et avant qu’il n’ait le temps de prendre un air triste ou d’exprimer ses regrets, elle ajouta : « Mais c’est bien comme ça. Je n’ai jamais été vraiment proche de ma famille. »

« Je vois ce que tu veux dire, » dit-il. « Même chose pour moi. Mes parents étaient des gens biens mais quand je suis devenu un adolescent et que j’ai commencé à me comporter comme tel, ils m’ont en quelque sorte tourné le dos. Je n’étais pas assez chrétien pour eux. Et j’aimais un peu trop les filles. Ce genre de choses. »

Mackenzie ne dit rien car elle était un peu sous le choc. Il n’avait jamais autant parlé de lui depuis qu’ils se connaissaient – et c’était sorti comme ça, soudainement, naturellement et de manière très inattendue.

Et alors, avant même de se rendre compte de ce qu’elle faisait, elle se mit de nouveau à parler. Et lorsque les mots sortirent de sa bouche, ce fut un peu comme si elle les vomissait.

« C’est un peu ce que ma mère m’a fait, » dit-elle. « J’ai grandi et elle s’est rendue compte qu’elle ne pouvait plus vraiment me contrôler. Et si elle ne pouvait plus me contrôler, alors elle n’avait plus envie d’avoir affaire à moi. Mais lorsqu’elle perdit ce contrôle sur moi, elle perdit également le contrôle sur presque tout le reste. »

« Les parents peuvent être merveilleux, n’est-ce pas ? » dit Bryers.

В« ГЂ leur maniГЁre. В»

В« Et ton pГЁre ? В» demanda Bryers.

La question lui fit l’effet d’une piqûre douloureuse au cœur mais elle se surprit à nouveau en répondant. « Il est mort, » dit-elle, sur un ton clair et net. Mais une partie d’elle avait tout de même envie de lui parler de la mort de son père et de comment elle avait découvert son cadavre.

La période où ils avaient été séparés semblait avoir amélioré leur relation professionnelle mais elle n’était toujours pas vraiment prête à partager ces blessures avec Bryers. Mais malgré sa réponse assez froide, Bryers avait néanmoins l’air beaucoup plus ouvert à la conversation et désireux de continuer à parler. Elle se demanda si ça avait à voir avec le fait qu’il travaillait maintenant avec elle avec la bénédiction et l’accord de sa hiérarchie.

« Je suis désolé de l’entendre, » dit-il. Puis il changea tout de suite de sujet, laissant comprendre par là à Mackenzie qu’il avait saisi son manque d’envie de parler davantage du sujet. « Mes parents... ils ne comprenaient pas pourquoi j’avais envie de faire ce boulot. Bien entendu, ils étaient très chrétiens. Quand je leur ai dit, à l’âge de dix-sept ans, que je ne croyais pas en Dieu, ils m’ont tout simplement laissé tomber. Depuis lors, mes parents sont tous les deux décédés. Mon père a encore tenu le coup six ans après la mort de ma mère et on a fini par faire un peu la paix après qu’elle soit décédée. Nous étions de nouveau en de bons termes lorsqu’il est mort d’un cancer des poumons en 2013. »

« Au moins, vous avez eu l’occasion de vous réconcilier, » dit Mackenzie.

В« Oui, en effet, В» dit-il.

« Tu ne t’es jamais marié ? Tu as des enfants ? »

« J’ai été marié pendant sept ans et j’ai eu deux filles. L’une d’entre elles fait aujourd’hui ses études universitaires au Texas, l’autre est quelque part en Californie. Elle ne me parle plus depuis dix ans, juste après qu’elle ait abandonné le lycée, soit tombée enceinte et se soit fiancée à un type de vingt-six ans. »

Elle hocha de la tête. La conversation lui paraissait trop étrange pour la continuer. C’était bizarre qu’il s’ouvre à elle de cette manière, mais elle lui en était reconnaissante. Les choses dont il lui avait parlées lui permettaient de mieux le comprendre. Bryers était un homme assez solitaire et ça tenait la route avec le fait d’avoir eu des relations difficiles avec ses parents.

Mais quant au fait qu’il avait deux filles avec lesquelles il parlait rarement, c’était une totale découverte. Ça expliquait un peu pourquoi il s’était ouvert à elle et pourquoi il avait l’air d’apprécier de travailler en sa compagnie.

Les deux heures suivantes furent remplies de conversations assez superficielles, principalement au sujet de l’affaire qui les occupait et de la formation de Mackenzie à l’académie. C’était agréable de pouvoir parler de ce genre de choses à quelqu’un et elle se sentit un peu coupable d’avoir écourté la conversation lorsqu’il lui avait posé des questions au sujet de son père.

Il fallut attendre encore une heure et quart avant que Mackenzie commence à voir des indications annonçant la sortie pour Strasburg. Elle sentit l’atmosphère changer dans la voiture, au moment où tous les deux commencèrent à mettre de côté leurs histoires personnelles et se concentrer uniquement sur le boulot qui les attendait.

Six minutes plus tard, Bryers prit la bretelle de sortie pour Strasburg. Lorsqu’ils entrèrent dans la ville, Mackenzie sentit son corps se contracter. Mais c’était une tension positive – le même genre de tension qu’elle avait ressentie au moment où elle était arrivée sur le parking avec l’arme de paintball en main, la veille de la remise des diplômes.

Elle était arrivée. Pas seulement à Strasburg mais surtout à cette étape dans sa vie à laquelle elle avait rêvée depuis le jour où elle avait été affectée à son premier travail inintéressant de bureau au Nebraska, avant qu’on ne lui donne vraiment sa chance.

Mon dieu, pensa-t-elle. C’était vraiment il y a seulement cinq ans et demi ?

Oui, de fait. Et maintenant qu’elle se trouvait littéralement amenée vers la réalisation de tous ces rêves, les cinq années qui séparaient ce travail de bureau de cet instant précis où elle se trouvait dans le siège passager de la voiture de Bryers, avaient plutôt l’air d’une course d’obstacles qui maintenait ces deux parties de sa vie bien séparées. Et ce n’était pas plus mal comme ça. Son passé ne lui avait jamais servi à rien d’autre qu’à la freiner et maintenant qu’elle avait enfin fini par le surmonter, elle était heureuse de le laisser pourrir derrière elle dans l’oubli.

Elle vit le panneau indiquant le parc naturel Little Hill et son cœur se mit à battre plus vite au moment où Bryers ralentit. Elle y était. Sa première affaire en tant qu’agent officiel du FBI. Elle savait que tous les yeux seraient dirigés sur elle.

Le moment Г©tait arrivГ©.




CHAPITRE CINQ


Quand Mackenzie sortit de la voiture dans le parking pour visiteurs du parc naturel Little Hill, elle se prépara à ce qui allait venir, sentant tout de suite la tension du meurtre flotter dans l’air. Elle ne savait pas pourquoi elle ressentait ce genre de choses, mais elle les ressentait. C’était une sorte de sixième sens qu’elle avait et qu’elle aurait parfois aimé ne pas avoir. Aucun autre de ses collègues avec lesquels elle avait travaillé n’avait ce genre de pressentiment.

Elle réalisa que d’une certaine manière ils avaient de la chance. C’était une bénédiction et, en même temps, une malédiction.

Ils traversèrent le parking en direction du centre d’information. Bien que l’automne ne se soit pas encore totalement installé en Virginie, sa présence se faisait sentir plus tôt que prévu. Autour d’eux, les feuilles des arbres commençaient à changer de couleur, tendant vers des nuances de rouge, de jaune et de doré. Un poste de sécurité se trouvait derrière le centre d’information où se tenait une femme qui avait l’air de beaucoup s’ennuyer et qui leur faisait signe en les regardant s’approcher.

Le centre d’information était une sorte de piège à touristes un peu terne. Des t-shirts et des gourdes étaient alignés sur des étagères et des cartes de la région, ainsi que des brochures avec des conseils de pêche, étaient étalées sur une petite étagère le long du côté droit. Au centre de la pièce, se trouvait une dame d’un âge dépassant certainement celui de la retraite. Elle leur souriait derrière son comptoir.

« Vous êtes avec le FBI, n’est-ce pas ? » demanda la femme.

« C’est ça, » dit Mackenzie.

La femme hocha légèrement de la tête et prit le téléphone qui se trouvait derrière le comptoir. Elle composa un numéro qui était noté sur un petit morceau de papier, près du téléphone. En attendant, Mackenzie s’éloigna un peu, suivie par Bryers.

« Tu as dit que tu n’avais pas encore parlé directement avec la police de Strasburg, c’est ça ? » demanda-t-elle.

Bryers acquiesça de la tête.

В« On va nous considГ©rer comme des amis ou comme un obstacle ? В»

« On va voir, j’imagine. »

Mackenzie hocha de la tГЄte et ils se retournГЁrent de nouveau vers le comptoir. La femme venait juste de raccrocher et levait les yeux vers eux.

« Le shérif Clements arrivera dans une dizaine de minutes. Il vous retrouvera au poste de garde qui se trouve à l’extérieur. »

Ils sortirent du centre d’information et se dirigèrent vers le poste de garde. À nouveau, Mackenzie se sentit presqu’hypnotisée par les couleurs resplendissantes des arbres. Elle marchait lentement, cherchant à s’imprégner de ce qui l’entourait.

В« HГ©, White ? В» dit Bryers. В« Г‡a va ? В»

В« Oui, Г§a va. Pourquoi tu poses la question ? В»

« Parce que tu trembles et que tu es un peu pâle. En tant qu’agent expérimenté du FBI, je dirais que tu es nerveuse – très nerveuse, même. »

Elle serra fermement les poings et se rendit compte qu’un léger tremblement secouait ses mains. Oui, elle était nerveuse mais elle pensait qu’elle était parvenue à le dissimuler. Apparement, ce n’était pas le cas.

« Écoute, tu es en plein dedans maintenant. Tu as le droit d’être nerveuse. Mais gère-le à ton avantage. Ne te bats pas contre et n’essaie pas de le dissimuler. Je sais que ça a l’air paradoxal, mais il faut que tu me fasses confiance sur ce coup-là. »

Elle hocha la tГЄte, un peu gГЄnГ©e.

Ils continuèrent en silence. Les couleurs des arbres autour d’eux semblaient les oppresser. Mackenzie regarda le poste de garde qui se trouvait devant eux et vit la barrière suspendue au poste et qui barrait la route. Bien que ça ait l’air stupide, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que son futur l’attendait de l’autre côté de cette barrière. Elle se sentait intimidée mais également anxieuse, de la traverser.

Quelques secondes plus tard, ils entendirent le bruit d’un petit moteur. Presque tout de suite après, ils virent une voiturette de golf déboucher du tournant. Elle roulait apparemment à plein régime et l’homme qui se trouvait derrière le volant était pratiquement recroquevillé derrière, comme s’il souhaitait que la voiturette aille plus vite.

La voiturette s’avança et Mackenzie put apercevoir l’homme qu’elle supposait être le shérif Clements. Il avait l’air d’un dur d’une quarantaine d’années. Il avait le regard vitreux d’un homme qui avait eu une vie difficile. Ses cheveux noirs commençaient à grisonner sur les tempes et il arborait une barbe d’un jour qui faisait apparemment toujours partie de son look.

Clements gara la voiturette, jeta Г  peine un regard au gardien qui se tenait dans le poste de garde et contourna la barriГЁre pour rejoindre Mackenzie et Bryers.

В« Agents White et Bryers, В» dit Mackenzie en tendant la main.

Clements prit sa main et la serra de maniГЁre passive. Il fit de mГЄme avec Bryers, avant de rediriger son attention vers le sentier asphaltГ© par lequel il Г©tait venu.

« Pour être tout à fait honnête, » dit Clements, « bien que j’apprécie fortement l’intérêt porté par le FBI, je ne suis pas vraiment sûr que nous ayons besoin de votre aide. »

« Et bien, maintenant que nous sommes ici, voyons si on peut vous donner un coup de main d’une manière ou d’une autre, » dit Bryers, sur un ton aussi amical que possible.

« OK alors, montez en voiture et allons jeter un œil, » dit Clements. Mackenzie faisait de son mieux pour le jauger au moment où ils montèrent dans la voiturette. Sa préoccupation principale depuis le début était de déterminer si Clements était seulement sous un stress immense ou si c’était juste un connard de par nature.

Elle était assise à l’avant avec Clements et Bryers avait pris place à l’arrière. Clements resta silencieux. En fait, on aurait dit qu’il faisait un effort spécial afin de leur faire savoir que ça le dérangeait fortement de les trimbaler avec lui.

Après environ une minute, Clements fit une embardée sur la droite, à l’endroit où la route présentait une bifurcation. C’était la fin de la route asphaltée et le chemin se rétrécit en un sentier étroit qui permettait à peine le passage de la voiturette.

В« Quelles sont les instructions qui ont Г©tГ© donnГ©es au gardien du poste de garde ? В» demanda Mackenzie.

« Personne n’a le droit d’entrer, » dit Clements. « Ni même les garde-forestiers, ni la police, à moins que j’en aie donné la permission. Il y a déjà assez de gens qui glandent par ici, rendant les choses plus difficiles qu’elles ne devraient l’être. »

Mackenzie prit note du commentaire et de l’attaque pas très subtile de Clements. Mais elle décida de l’ignorer. Elle n’allait pas se lancer dans une discussion avec lui sur ce sujet avant qu’ils n’aient eu l’occasion de voir la scène du crime.

Environ cinq minutes plus tard, Clements appuya sur les freins. Il descendit de la voiturette avant même qu’elle n’ait eut le temps de s’arrêter complètement. « Venez, » dit-il, comme s’il parlait à un enfant. « Par ici. »

Mackenzie et Bryers descendirent de la voiturette. La forêt les entourait de ses hauts arbres. C’était superbe mais également rempli d’une sorte de silence épais, que Mackenzie avait appris à reconnaître comme un présage – un signe qu’il y avait du sang et de mauvaises nouvelles dans l’air.

Clements les guida à travers bois, en marchant rapidement devant eux. Il n’y avait pas vraiment de sentier à proprement parler. Ici et là, Mackenzie pouvait voir des signes de traces de pas autour des arbres et à travers les feuillages mais c’était tout. Sans même s’en rendre compte, elle passa devant Bryers en essayant de suivre Clements. De temps à autre, elle devait écarter des branchages ou retirer des fils de toiles d’araignée de son visage.

Après deux ou trois minutes, elle commença à entendre le son de plusieurs voix. Le bruit de mouvements se fit de plus en plus fort et elle commença à comprendre ce dont avait parlé Clements. Sans même voir la scène du crime, Mackenzie pouvait déjà dire qu’elle devait être bondée de gens.

Elle put s’en rendre compte moins d’une minute plus tard lorsque la scène fut en vue. Le ruban et les petits drapeaux délimitant la zone dessinaient une grande forme triangulaire au sein de la forêt. À l’intérieur du ruban jaune et des drapeaux rouges, Mackenzie compta huit personnes, y compris Clements. Avec elle et Bryers, ça en ferait dix.

В« Vous voyez ce que je veux dire ? В» demanda Clements.

Bryers arriva à hauteur de Mackenzie et soupira. « Et bien, c’est un beau bordel. »

Avant de continuer à avancer, Mackenzie fit de son mieux pour analyser la scène. Parmi les huit hommes, quatre faisaient partie de la police locale. Ils étaient facilement identifiables par leurs uniformes. Deux autres portaient également un uniforme mais d’un autre style – probablement la police d’état, pensa Mackenzie. Elle fit de son mieux pour analyser la scène en elle-même et éviter d’être déconcentrée par les chamailleries alentour.

L’endroit semblait être totalement choisi au hasard. Il n’y avait aucun élément d’intérêt, rien qui puisse être considéré comme symbolique. L’endroit était semblable à n’importe quelle autre partie de cette forêt. Elle estima qu’ils se trouvaient à environ deux kilomètres du sentier principal. Le feuillage n’était pas particulièrement dense ici mais il y avait une sorte d’isolement tout autour d’eux.

Une fois qu’elle eut terminé d’analyser minutieusement la scène, elle regarda en direction des hommes qui se chamaillaient. Quelques-un semblaient agités et d’autres avaient l’air fâché. Deux d’entre eux ne portaient aucun uniforme ni signe distinctif de leur profession.

В« Qui sont les types sans uniforme ? В» demanda Mackenzie.

В« Je ne sais pas, В» dit Bryers.

Clements se tourna vers eux, avec un air renfrogné. « Des garde-forestiers, » dit-il. « Joe Andrews et Charlie Holt. Un truc du style arrive et voilà qu’ils se prennent pour des policiers. »

L’un des garde-forestiers jeta un regard foudroyant dans leur direction. Mackenzie était presque certaine que Clements avait fait un signe de tête en direction de cet homme lorsqu’il avait dit Joe Andrews. « Fais attention à toi, Clements. C’est un parc naturel d’État, » dit Andrews. « Tu as autant d’autorité ici qu’un moucheron. »

« C’est peut-être vrai, » dit Clements. « Mais tu sais aussi bien que moi que tout ce que j’ai à faire, c’est de passer un coup de fil au commissariat. Je peux te faire sortir d’ici en moins d’une heure, alors fais ce que tu as à faire et casse-toi. »

« Espèce de petit connard d’hypocrite… »

« Allons, » dit un troisième homme. C’était l’un des policiers d’État. Il était bâti comme une armoire à glace et portait des lunettes de soleil qui lui donnaient l’allure d’un méchant tout droit sorti d’un mauvais film d’action des années quatre-vingt. « J’ai l’autorité de vous jeter tous les deux d’ici. Alors, arrêtez de vous comporter comme des enfants et faites votre boulot. »

L’homme remarqua soudain la présence de Mackenzie et de Bryers. Il s’avança vers eux en secouant la tête d’un air désolé.

« Désolé que vous ayez à entendre toutes ces sottises, » dit-il, au moment où il s’approcha. « Je suis Roger Smith, de la police d’État. Une drôle de scène qu’on a là, n’est-ce pas ? »

« C’est ce qu’on est venu essayer de comprendre, » dit Bryers.

Smith se retourna en direction des sept autres hommes et dit d’une voix retentissante : « Écartez-vous un peu et laissez les fédéraux faire leur travail. »

« Et qu’en est-il de notre travail ? » demanda l’autre garde-forestier. Charlie Holt, se rappela Mackenzie. Il regardait Mackenzie et Bryers d’un air méfiant. Mackenzie trouva même qu’il avait l’air un peu intimidé et effrayé par leur présence. Lorsque Mackenzie regarda dans sa direction, il baissa les yeux au sol et se pencha pour ramasser un gland qui y traînait. Il passa le gland d’une main à l’autre, puis se mit à chipoter avec lui.

В« Vous avez eu assez de temps, В» dit Smith. В« Г‰cartez-vous durant un instant. В»

Tout le monde obtempéra. Les garde-forestiers en particulier avaient l’air très mécontents. Faisant tout son possible afin de détendre l’atmosphère, Mackenzie se dit qu’il pourrait être utile d’essayer d’impliquer autant que possible les garde-forestiers afin d’éviter d’heurter toute sensibilité.

« Quel genre d’informations les garde-forestiers ont généralement besoin de retirer d’une situation telle que celle-là ? » demanda-t-elle aux garde-forestiers, au moment où elle se baissait pour passer en-dessous du ruban entourant la scène du crime et qu’elle commençait à observer ce qui l’entourait. Elle vit un jalon à l’endroit où la jambe avait été retrouvée et, à une bonne distance de là, elle vit un autre jalon où le reste du corps avait été découvert.

« D’une part, nous avons besoin de savoir pour combien de temps le parc devra être fermé, » dit Andrews. « Aussi égoïste que ça puisse paraître, ce parc ramène pas mal de revenus en terme de tourisme. »

« Tu as raison, » dit Clements. « C’est vraiment de l’égoïsme. »

« Et bien, je considère qu’on a bien le droit d’être égoïste de temps à autre, » dit Charlie Holt, sur un ton défensif. Puis il regarda fixement Mackenzie et Bryers d’un air dédaigneux.

В« Pour quelle raison ? В» demanda Mackenzie.

« Est-ce que l’un d’entre vous a une idée du genre de merde à laquelle nous devons faire face ici ? » demanda Holt.

В« Non, pas vraiment, В» rГ©pondit Bryers.

« Des adolescents qui tirent un coup, » dit Holt. « Parfois, de véritables orgies. Des pratiques religieuses bizarres liées à la Wicca. J’ai même déjà attrapé un ivrogne qui se tapait une souche d’arbre – et je parle avec le pantalon baissé et tout ce qui s’en suit. Ça, c’est le genre d’histoire qui fait rire la police d’État et que la police locale utilise pour raconter des blagues durant le weekend. » Il se baissa et ramassa un autre gland, le chipotant de la même manière qu’il l’avait fait avec le premier.

« Oh, » ajouta Joe Andrews. « Il y a eu aussi cette fois où j’ai pris sur le fait un père qui agressait sexuellement sa fillette de huit ans. Ça se passait à quelques mètres d’un chemin de pêche et j’ai dû intervenir. Et quel genre de remerciement j’en reçois ? La fille qui me hurle de laisser son père tranquille et un avertissement de la part de la police locale et d’État me notifiant d’y aller un peu plus doucement la prochaine fois. Alors oui… ça nous arrive parfois d’être égoïste concernant notre autorité. »

Le silence envahit la forêt, seulement interrompu par l’un des policiers locaux qui laissa échapper un rire dédaigneux en disant : « Oui. Autorité. Bien sûr. »

Les deux garde-forestiers regardèrent l’homme avec une profonde haine dans les yeux. Andrews fit un pas en avant. On aurait dit qu’il allait exploser de rage. « Va te faire foutre, » dit-il simplement.

« Je vous ai dit de cesser ces idioties, » dit l’officier Smith. « Je dois encore vous faire une seule fois la remarque et je vous expulse tous d’ici. Vous m’avez bien compris ? »

Apparemment, ils avaient bien compris. Le silence envahit de nouveau la forêt. Bryers passa derrière le ruban qui délimitait la scène de crime et s’approcha de Mackenzie. Quand les hommes furent tous retournés à leurs occupations, il se pencha vers elle. Elle pouvait sentir le regard de Charlie Holt fixé sur elle et ça lui donna envie de le frapper.

« Ça pourrait mal tourner, » dit Bryers à voix basse. « Faisons en sorte de sortir d’ici le plus rapidement possible. Qu’est-ce que tu en penses ? »

Elle se mit au travail et passa l’endroit au peigne fin tout en prenant mentalement des notes. Bryers était ressorti de la scène de crime. Il était appuyé contre un arbre et toussait dans son bras. Mais elle fit de son mieux pour que ça ne la distraie pas. Elle garda les yeux rivés au sol, observant attentivement le feuillage, la terre et les arbres. La chose qui n’avait pas vraiment de sens à ses yeux, c’était comment un corps en si mauvais état avait été découvert ici. Il était difficile de savoir quand le meurtre avait été commis ou quand le cadavre avait été déposé car il n’y avait aucun signe au sol trahissant un acte brutal ou violent.

Elle concentra son attention sur les emplacements où se trouvaient les pancartes indiquant les endroits où les différentes parties du corps avaient été retrouvées. Elles étaient trop éloignées l’une de l’autre pour que ce soit accidentel. Celui qui a déposé ce corps mutilé en plaçant les différentes parties si loin l’une de l’autre, avait l’intention de le faire de cette manière.

« Officier Smith, savez-vous s’il y avait des marques de morsures d’animaux sauvages présentes sur le corps ? » demanda-t-elle.

« S’il y en avait, elles étaient tellement minuscules qu’un examen à l’oeil nu n’a pas permis de les remarquer. Bien entendu, nous en saurons davantage dès que l’autopsie sera terminée. »

« Et aucun membre de votre équipe ou de la police locale n’a bougé le corps ou les membres sectionnés ? »

В« Non. В»

В« MГЄme chose de mon cГґtГ©, В» dit Clements. В« Et vous, les garde-forestiers ? В»

« Non, » dit Holt, en ricanant sur un ton méchant. On aurait dit qu’il allait maintenant se vexer pour un tout ou pour un rien.

В« Puis-je vous demander en quoi Г§a pourrait aider Г  trouver le responsable de ce carnage ? В» lui demanda Smith.

« Et bien, si l’assassin avait agi ici, il y aurait du sang partout, » expliqua Mackenzie. « Même si ça s’était passé il y a longtemps, il y aurait au moins des traces aux alentours. Et je n’en vois aucune. L’autre possibilité est qu’il ait déposé le corps ici. Mais si c’est le cas, pourquoi une jambe tranchée se retrouverait-elle aussi éloignée du reste du corps ? »

« Je ne vous suis pas, » dit Smith. Derrière lui, elle vit que Clements écoutait également d’une oreille attentive, tout en essayant que ça ne se voie pas.

« Ça me mène à penser que le tueur a effectivement déposé le corps ici mais qu’il a intentionnellement séparé les différents morceaux du corps. »

« Pourquoi ? » demanda Clements, incapable de feindre plus longtemps qu’il n’écoutait pas.

« Il pourrait y avoir plusieurs raisons, » dit-elle. « Ça pourrait être pour une raison aussi morbide que le fait de s’amuser avec le corps, de l’éparpiller comme s’il ne représentait rien de plus que des jouets pour s’amuser. Ou l’envie d’avoir toute notre attention. Ou il pourrait y avoir une sorte de raison calculée – la distance, le fait que ce soit une jambe, etc. »

В« Je vois, В» dit Smith. В« Et bien, certains de mes hommes ont dГ©jГ  rГ©digГ© un rapport reprenant la distance entre le corps et la jambe et toutes les autres mesures qui pourraient vous ГЄtre utiles. В»

Mackenzie jeta de nouveau un oeil autour d’elle – en direction du groupe d’hommes rassemblés et de l’apparemment paisible forêt – et elle fit une pause. Il n’y avait pas de raison évidente au choix de cet emplacement. Ce qui lui faisait penser que cet endroit était un hasard. Mais le fait d’être si éloigné des sentiers battus lui indiquait également autre chose. Ça voulait dire que l’assassin connaissait assez bien cette forêt – et même peut-être le parc en entier.

Elle se mit à marcher autour de la scène de crime, cherchant attentivement toute trace de sang séché. Mais il n’y avait rien. Plus le temps passait, plus elle était convaincue que sa théorie était la bonne.

« Garde-forestiers, » dit-elle. « Il y a-t-il un moyen d’obtenir le nom des gens qui fréquentent ce parc ? Je pense surtout à des personnes qui viennent souvent ici et qui connaissent très bien la région. »

« Pas vraiment, » dit Joe Andrews. « Le mieux qu’on puisse faire, c’est vous fournir une liste de donateurs. »

« Ce n’est pas nécessaire, » dit-elle.

« Vous avez une théorie à mettre à l’épreuve ? » demanda Smith.

« Le meurtre en soi a eu lieu ailleurs et le corps a été déposé ici, » dit-elle, en se parlant à moitié à elle-même. « Mais pourquoi ici ? Nous sommes à environ deux kilomètres du sentier principal et il n’y a rien de spécial à cet endroit. Ce qui me fait penser que le responsable de tout ça connait très bien le parc. »

Pendant qu’elle parlait, quelques-uns hochèrent de la tête mais elle sentit qu’ils doutaient d’elle ou qu’ils s’en fichaient royalement.

Mackenzie se retourna vers Bryers.

« Pour toi, c’est bon ? » demanda-t-elle.

Il hocha de la tГЄte.

В« Merci, messieurs. В»

Ils la regardèrent tous en silence. Clements avait l’air d’essayer de la jauger.

« OK, on y va alors, » dit finalement Clements. « Je vous ramène jusqu’à votre voiture. »

В« Non, pas besoin, В» dit Mackenzie, sur un ton lГ©gГЁrement rude. В« Je crois que je prГ©fГЁre marcher. В»

Mackenzie et Bryers prirent congГ© et se dirigГЁrent Г  travers bois en direction du sentier par lequel Clements les avait amenГ©s.

Alors qu’ils s’enfonçaient dans la forêt, en laissant derrière eux la police d’État, les garde-forestiers, Clements et ses hommes, Mackenzie ne put s’empêcher d’apprécier la grandeur de la forêt. Il y avait quelque chose d’inquiétant dans le fait de penser aux possibilités infinies qu’elle offrait. Elle pensa à ce que le garde-forestier avait raconté au sujet des innombrables crimes qui avaient lieu dans ces bois et un frisson glacé lui traversa le dos.

Pour quelqu’un qui prenait son pied en charcutant des gens à la manière de la personne qui avait été retrouvée dans ce triangle dans les bois et qui connaissait bien cette forêt, il n’y avait littéralement aucune limite à la menace que cette personne pourrait représenter.

Et elle était sûre qu’elle frapperait à nouveau.




CHAPITRE SIX


Mackenzie s’intalla à son bureau un peu après dix-huit heures. Elle était épuisée après une longue journée de travail et elle se mit à ranger ses notes afin de se préparer pour la réunion qu’elle avait demandée à leur retour de Strasburg.

On frappa à sa porte et quand elle leva les yeux, elle vit Bryers qui avait l’air aussi fatigué qu’elle et qui tenait en main un dossier et une tasse de café. On aurait dit qu’il faisait de son mieux afin de dissimuler sa fatigue. Elle se rappela tout d’un coup qu’il était resté en retrait lors de leur visite au parc naturel, lui laissant gérer la situation avec Clements, Smith, Holt et les autres égocentriques au milieu des bois. Ça, ajouté à sa toux, lui fit se demander s’il ne s’était pas chopé quelque chose.

В« La rГ©union est sur le point de commencer, В» dit-il.

Mackenzie se leva et le suivit jusqu’à la salle de conférence qui se trouvait au fond du couloir. Au moment où elle entra, elle jeta un oeil autour d’elle. Plusieurs agents et experts étaient présents et constituaient l’équipe travaillant sur l’affaire du parc naturel Little Hill. Ils étaient sept en tout et bien qu’elle pense que c’était une équipe bien trop nombreuse pour un début d’affaire, ce n’était pas à elle de le mentionner. C’était Bryers qui décidait et elle était déjà juste contente d’être incluse dans l’équipe. C’était bien plus intéressant que de potasser les lois concernant l’immigration ou d’être noyée sous une tonne de paperasserie.

« Nous avons une journée bien remplie aujourd’hui, » dit Bryers. « Alors commençons par une rapide récapitulation. »

S’il avait été épuisé au moment d’entrer dans la salle, il était parvenu à se débarrasser de la fatigue. Mackenzie observait et écoutait avec attention pendant que Bryers informait les sept autres personnes présentes sur ce qu’ils avaient découvert aujourd’hui dans les bois du parc naturel Little Hill. Ils prenaient tous des notes, certains gribouillant sur des bloc-notes, d’autres tapant sur leur tablette ou smartphone.

« Une chose à ajouter, » dit l’un des agents. « Je viens de l’apprendre il y a environ un quart d’heure mais les médias locaux sont officiellement au courant de l’affaire. Ils ont déjà rebaptisé ce type comme le tueur du camping. »

Le silence envahit la piГЁce durant un instant et Mackenzie soupira dans son for intГ©rieur. Г‡a leur rendrait la tГўche bien plus difficile Г  tous.

В« Et bien, Г§a a Г©tГ© rapide, В» dit Bryers. В« Fait chier. Comment ont-ils fait pour ГЄtre aussi vite au courant ? В»

Personne ne répondit mais Mackenzie pensait connaître la réponse. Une petite ville comme Strasburg était peuplée de gens qui adoraient voir le nom de leur ville apparaître aux actualités - même si c’était pour annoncer de mauvaises nouvelles. Quelques-uns des garde-forestiers ou des policiers locaux pourraient très bien rentrer dans cette catégorie.

« Bon, pour continuer, » dit Bryers, sans se décourager, « les dernières informations reçues proviennent de la police d’État. Ils ont transmis certains détails concernant la scène du crime à la police scientifique. Nous savons maintenant que la jambe coupée et que le corps auquel elle était auparavant rattachée se trouvaient à exactement un mètre de distance. Nous n’avons absolument aucune idée de si ce fait est important ou pas, mais nous allons nous pencher là-dessus. Il y a aussi… »

Un coup frappé à la porte l’interrompit. Un autre agent pénétra dans la salle et tendit un dossier à Bryers. Il lui murmura rapidement quelque chose à l’oreille, puis sortit aussi vit qu’il n’était entré.

« Le rapport du médecin légiste concernant le deuxième corps, » dit Bryers, en ouvrant le dossier et en y jetant un coup d’œil. Il le survola rapidement du regard puis fit passer les trois feuilles au reste de l’équipe. « Comme vous pourrez le constater, il n’y a aucune trace laissée sur le corps par des prédateurs affamés, bien qu’il y ait de légers hématomes le long du dos et des épaules. Apparemment, la jambe et la main droite ont été tranchées avec un couteau plutôt émoussé ou une sorte de grande lame. On dirait que les os ont été plutôt brisés que sciés. C’est une différence par rapport à l’affaire d’il y a deux ans mais, bien sûr, c’est peut-être seulement dû au fait que le tueur n’entretient pas spécialement ses outils et ses armes. »

Bryers leur laissa un moment pour lire le rapport. Mackenzie le regarda à peine, se fiant totalement au compte-rendu que Bryers leur avait fourni. Elle commençait déjà à lui faire confiance et bien qu’elle connaisse l’importance des rapports et des dossiers, elle préférait un rapport verbal direct.

« Nous connaissons maintenant aussi le nom de la victime : Jon Torrence, vingt-deux ans. Il a disparu il y a environ quatre semaines. Le dernier endroit où il a été aperçu était un bar à Strasburg. Certains d’entre vous auront la tâche pas très agréable d’aller parler à sa famille aujourd’hui. Nous avons également récupéré des informations concernant la victime d’il y a deux ans. Agent White, pourriez-vous faire un compte-rendu à l’équipe concernant cette victime ? »




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